Hommage à un hôte fidèle : Jean-Claude PECKER

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Il aurait eu 97 ans au printemps, ce vieux Monsieur à l'énergie infatigable, pétri de savoir et d'humanisme. A chaque séjour au Clos de la Garenne, son sourire et sa joie de vivre nous illuminaient tel le soleil qu'il a étudié toute sa vie et dont il aimait nous montrer les éruptions sur son ordinateur. Il tapait sur son clavier avec deux doigts mitrailleurs, faisant rouler la souris sur sa cuisse, installé au bureau près de nous et picorant quelques meringues encore chaudes. Il fit partie des rares à avoir partagé nos repas familiaux jusque dans la cuisine, en toute simplicité.

Il arriva un soir de Mai 2008 au volant d'une vieille 205 un peu cabossée par la vie, comme lui, mais continuant à avancer vaille que vaille. Il se réjouit et se régala de tout et promit de revenir à l'issue de son congrès d'astronomie à Bordeaux. Ce qu'il fit, encore et encore, d'année en année.

Il nous invita sur son île tant aimée au ciel si pur d'où il pouvait observer les étoiles et où il finit sa vie mais nous ne trouvâmes jamais l'occasion d'y aller hélas. Un jour peut-être irons-nous nous promener à la pointe des Corbeaux... Nous lui rendîmes toutefois visite dans son appartement Parisien, meublé de livres du sol au plafond. Son esprit alerte et sa belle plume poursuivaient lecture et écriture, aussi bien pour la science que pour la littérature, ses deux passions transmises par ses parents perdus trop tôt.

A l'âge où nombre de nos semblables pantouflent devant un écran, il voyageait encore au bout du monde, même souffrant du dos au point d'être porté de la rive au bateau et inversement : "J'ai fait l'Amazonie à dos d'homme" nous racontait-il en riant.

A 92 ans, après de nombreuses années de veuvage, il vint même nous présenter sa nouvelle compagne Simone, son assistante durant 50 ans. Nous en gardons un souvenir très attendrissant. Il aimait notre tisane de mélisse du jardin et notre confiture melon-anis. Il aimait la Garenne, comme un endroit rare et préservé de notre monde. 

Il ensoleilla plus d'une table d'hôtes, maniant avec un art consommé gentillesse, connaissance scientifique et érudition. Comment oublier ce premier dîner ? Celui où, au gré de la conversation, nous en vînmes à évoquer les accointances des langues et où il nous lut la Scène IV de l'Acte Trois de King Henry the Fifth de Shakespeare (dont les Complete Works figurent heureusement dans notre bibliothèque), celle où le français est parlé à la cour d'Angleterre.

Il voulut revoir Rochefort et Brouage et je l'y conduisis un beau jour de printemps. Quelle jolie promenade, il y a 9 ans déjà !

Il nous a quittés le 20-02-2020, date à deux chiffres qui, s'additionnant, forment le 8 de l'infini du cosmos...

Hugues Aufray me pardonnera bien de lui emprunter le refrain de sa célèbre chanson pour un dernier hommage :

"Adieu Monsieur le Professeur,
On ne vous oubliera jamais
Et tout au fond de notre cœur
Vos mots sont écrits à la craie.
Nous vous offrons ces quelques fleurs
Pour dire combien on vous aimait
On ne vous oubliera jamais
Adieu Monsieur
Jean-Claude PECKER"

Merci pour tout Jean-Claude. Puisse votre étoile préférée, notre chaud soleil, illuminer encore longtemps votre mémoire et nos vies !

Astrophysicien et professeur émérite au Collège de France

Membre de l'Académie des Sciences

Société Astronomique de France

Jean-Claude sur les remparts puis dans l'église de Brouage